Tables volantes

Mais non. Ce n’est pas un ovni. Cet objet qui traverse le ciel est une table volante qui s’enfuit avec une nouvelle victime.

Comme il s’est produit ici. Un de ces engins vient de s’envoler avec une famille. La piste de décollage est libre, mais une autre table prendra sa place bientôt.

Ces véhicules redoutables attendent partout qu’un imprudent y pose ses fesses. Près des pistes cyclables, sur le bord des étendues d’eau, à l’ombre d’un arbre, en ville et même en banlieue. La meilleure façon de ne pas se faire enlever, est d’en trouver un qui n’a pas payé sa cotisation à l’escadron. Sans permis de vol, il se retrouve attaché au sol.

Pour des pique-niques encore plus sécuritaires, choisissez de vous assoir sur une couverture étendue sur le gazon. Et restez loin des buissons venimeux.

Mais non. Ce n’est pas un ovni. Cet objet qui traverse le ciel est une table volante qui s’enfuit avec une nouvelle victime.

Comme il s’est produit ici. Un de ces engins vient de s’envoler avec une famille. La piste de décollage est libre, mais une autre table prendra sa place bientôt.

Ces véhicules redoutables attendent partout qu’un imprudent y pose ses fesses. Près des pistes cyclables, sur le bord des étendues d’eau, à l’ombre d’un arbre, en ville et même en banlieue. La meilleure façon de ne pas se faire enlever, est d’en trouver un qui n’a pas payé sa cotisation à l’escadron. Sans permis de vol, il se retrouve attaché au sol.

Pour des pique-niques encore plus sécuritaires, choisissez de vous assoir sur une couverture étendue sur le gazon. Et restez loin des buissons venimeux.

Taxi dermie

Dans d’autres villes, ils sont tous peints de la même couleur. Cela les rend jaunement plus faciles à reconnaitre. Aucun risque de monter à bord d’un taxi par accident.

Comme ce que je viens de faire.

Zut.

Dans d’autres villes, une grille ou une vitre protège les passagers. Aucun risque de se faire extraire les yeux par les mandibules électriques du chauffeur. Aucun risque de se faire happer par la langue gluante du coffre à gants.

Pas ici.

Zut.

Dans d’autres villes, une…

— Où allez-vous, Monsieur? me demande le chauffeur avec un accent extraplanétaire.

Je croise son regard dans le rétroviseur. Ce sont de faux yeux. C’est un faux visage. En dessous se cache sa peau métallique d’androïde mercurien. Son béret se prépare à se soulever pour révéler un amplificateur d’ondes radioactives.

Je lui dis le nom de mon quartier pour qu’il se mette en route. Même les robots les plus sophistiqués ne peuvent conduire et liquéfier leur proie en même temps. Une diversion pour survivre encore quelques minutes supplémentaires.

Ou seulement quelques secondes.

Le chauffeur louvoie sur la voie. Il cherche à m’accidenter et écrapoutir un piéton du même coup. Je m’accroche du mieux que je peux. Le véhicule mutantique se faufile, déformant l’espace routier pour s’insérer dans des endroits improbables. J’hésite entre garder ma ceinture de sécurité ou me détacher pour pouvoir fuir plus vite.

À la radio, j’entends les ordres venant du poste de commandement en orbite. La voix magnétique s’adresse aux robots-soldats par leurs noms numériques. Nous sommes sur le point de nous envoler. Le compteur fixé au tableau de bord indique le niveau d’énergie plasmatroscopique qui croît rapidement. Le moteur sera complètement chargé dans quelques instants.

Il n’y a qu’une façon d’interrompre ce compte à rebours inversé.

— Chauffeur, je vais descendre ici.

Morceau de viande

La journée était terminée depuis un bon moment. Je marchais en ville quand j’ai remarqué plusieurs personnes qui faisaient la queue devant un édifice illuminé. Tout le monde souriait et parlait sur un ton joyeux. Quelques jeunes demoiselles surexcitées sautillaient d’impatience. Ça semblait si amusant à l’intérieur qu’un costaud montait la garde pour contrôler l’accès aux plaisirs. J’avais envie de me joindre à la fête et je suis entré moi aussi.

Quelle erreur.

En entrant, j’ai aussitôt entendu les puissants battements de coeur de la bête immense qui attendait pour nous dévorer. Avant même de penser à rebrousser chemin, une hybride à l’accueil me tamponna le dessus de la main. J’étais marqué comme du bétail. Derrière moi, le garde ne contrôlait pas l’entrée, il bloquait plutôt la sortie. J’ai aperçu, trop tard, le fil électronique qui pendait de son oreille. Le robot-soldat surveillait l’abattoir.

Fidèle à mes habitudes, j’ai gardé mon calme. Il y a souvent plus d’une façon d’échapper à leurs pièges. Il suffit de bien observer et analyser. Convaincu de trouver une manière efficace de m’évader, j’ai accompagné le troupeau dans l’antre.

Ce n’était pas beau à voir.

En fait, c’était d’abord difficile à voir. Le faible éclairage empêchait de bien différencier les mutants des humains. Il fallait regarder de très près pour reconnaitre un faux visage qui avait été peint. Le nombre de créatures qui avaient eu recours à des prothèses ou autres artifices pour se déguiser était beaucoup plus élevé que ce qu’un bref coup d’oeil pouvait laisser deviner. Un travail de plusieurs heures avait de toute évidence été requis pour plusieurs spécimens. Parmi les rares vrais humains que j’ai remarqués, certains venaient déjà de se faire prendre.

Un pauvre homme, coincé dans un fauteuil, se faisait dévorer à pleine bouche par un parasite en jupe assis sur lui. Un autre s’était fait encercler par trois reptiloptères portant de minuscules bouts de tissus pour bien mettre en évidence leurs uniformes de peau humaine. Dans l’enclos central, des victimes agencées en cercle se débattaient des suites d’un venin épileptique, autour de leurs sacs à main qu’elles n’arrivaient plus à tenir. Plus loin, une pauvre jeune femme, si jolie, restait prisonnière d’une cage surélevée.

Je devais être très prudent.

Des rayons laser balayaient la pièce. J’aurais pu me faire trancher à tous moments. Un nuage de gaz nocifs rampait sur le sol, menaçant de m’empoisonner les jambes. Le bruit cacophonique aux décibels ultrabioniques enterrerait n’importe quel appel à l’aide.

Et surtout une voix normale.

De belles lèvres roses articulaient quelques mots dans ma direction. Je me suis approché et penché pour mieux entendre. Mes yeux longèrent la nuque et suivirent le collier qui descendait dans des profondeurs tapissées de dentelle. Rondes et douces. Le soyeux parfum d’une chevelure de printemps caressa mes narines. Une main chaude aux doigts fins se déposa sur mon épaule et une voix de clochettes cria mélodieusement dans mes oreilles.

Je n’ai toujours pas compris ce qu’elle disait. Mon regard croisa ses yeux brillants un bref instant, avant de retourner plonger quelque part dans l’ouverture béante de sa blouse. Peut-être une transcription de ses paroles se trouverait là.

Non. Même en scrutant, je ne voyais pas de sous-titre. Et il y avait encore trop de boutons attachés pour permettre une exploration d’envergure. Un peu déçu, j’en ai profité pour réfléchir une demi-seconde, ce qui suffit largement pour une personne futée comme moi.

Avant d’aller plus loin, je devais vérifier si elle travaillait pour eux.

— Tu viens souvent ici?

Elle sourit. Sa main, qui n’avait toujours pas quitté mon épaule, descendit le long de mes pectoraux.

— Oui, répondit-elle en continuant de tâter. Je viens ici trop souvent, en fait. Je ne tiens donc pas particulièrement à y passer le reste de la soirée… Tu vois ce que je veux dire?

J’ai hoché la tête de façon affirmative. Cette agente préférait consumer ses proies loin de l’antre de la bête. Elle voulait me garder comme animal d’élevage. M’engraisser de fourrage. Me manger. Gruger mes os. Sucer la moelle. J’ai conclu qu’il valait quand même mieux la suivre, pour ainsi échapper à la boucherie.

Elle me traina dans sa tanière. Me plaqua contre un mur, me lança sur le mobilier. Je n’avais pas peur. Ses attaques échoueraient. Impossible de percer ma défense.

J’avais avec moi un bouclier pour assurer ma protection.

Certification humanoïde normal

S’ils me suivent sur Twitter, ils vous y suivent peut-être aussi.

Comment différencier les vrais humains des agentes, robotroniques, mutantosaures, hybridomorphes, extratrucs et propagandifiques? Il faut posséder un fin sens de l’observation et un excellent esprit d’analyse. Comme moi.

Je mets donc encore une fois mes talents au service de la sauvegarde de l’humanité. Vous trouverez sur mon profil un classement d’usagers selon les menaces qu’ils posent.

http://twitter.com/_DeBleu/lists

C’est inquiétant. Si peu d’usagers sont certifiés humanoïdes normaux.

Propagande du troisième type

J’avance lentement dans le long corridor sans fenêtres. Une lumière violacée, dont la source m’échappe, se reflète sur des murs métalliques. Des colonnes sombres et recourbées longent les parois, mettant la voie que j’emprunte entre parenthèses. Des explosions résonnent tout près, accompagnées par le sifflement de rayons laser.

Je me trouve dans un vaisseau extra-terrestre.

Je regarde derrière, devant, le plancher, le plafond. Mon regard balaie l’architecture étrangère tellement vite que j’en suis étourdi. Le haut et le bas semblent inversés. Je fais quelques pas de côté, mais je reste coincé dans les reliefs et saillies du mur. Mes déplacements sont restreints. Je ne pourrai jamais fuir avec des mouvements aussi limités.

Ils s’approchent.

Mon coeur s’accélère. Je transpire déjà, même si j’ai à peine bougé. Ma respiration s’est rarement effectuée de façon aussi saccadée. Je vois des points rouges partout autour de moi. La nervosité cause une désorientation totale. Le plancher, c’est en bas ou en haut? Aller à gauche? Revenir sur mes pas?

Détonations. Coups de feu. Explosions.

Pouls effréné.

Angoisse.

L’un d’eux s’engage dans le corridor. Un colosse en armure futuriste, dont la silhouette rappelle celle d’un joueur de football américain. La visière opaque de son casque empêche de voir son visage, mais il n’en a probablement pas. Cette armure est l’exosquelette d’un hybride cybernétique. De toute façon, ce n’est pas le moment de me soucier de la couleur de ses yeux ou de la configuration de sa pilosité faciale.

Le canon de son arme est braqué sur moi.

Je déteste les affrontements. Je préfère éviter les combats. La fuite est toujours la meilleure option. Sauf cette fois. La fuite aurait comme simple conséquence de le laisser me tirer dans le dos à bout portant. Je suis tellement désorienté que je me déplace avec autant d’agilité qu’un hippopotame obèse ivre. Je ne peux pas courir. L’hybride semble le savoir et fonce droit vers moi.

Mais le canon de mon arme est aussi braqué sur lui.

J’enfonce les gâchettes. Mon canon crache des dizaines de balles. La violence de mon attaque vibre dans mes mains. Je tente de garder la mire sur son corps. Je vise le coeur. Je vise la tête. Je vise partout. Je le peinture de balles. Je lance même une grenade qui va exploser dans le corridor derrière lui. Un feu d’artifice de violence.

Et il tombe.

Le cadavre s’affaisse comme une marionnette aux fils coupés. J’ai abattu ma cible. Une cible. Parmi tant d’autres. Le bruit de fusillades poursuit son rugissement à la sortie du corridor. Ou à l’entrée.

Un autre attaquant surgit à l’extrémité de mon champ de vision. J’essaie de me retourner, mais tout ce que j’arrive à faire, c’est d’avoir un angle de vue inutile sur le plafond. Pendant ce temps, il me mitraille. Des fléchettes roses saturent le corridor et transpercent mon corps à multiples reprises. Ma vie s’efface à vue d’oeil. Incapable de riposter. Impossible de me défendre. Aucune chance de fuir.

Je meurs.

Durant un bref moment, je me vois moi-même, de l’extérieur. Ma carcasse est écrasée contre le mur, dans un angle inversé invraisemblable. J’aperçois mon assassin qui poursuit son chemin vers sa prochaine victime.

Je débranche la console.

Croient-ils vraiment que je vais les laisser s’entrainer à m’éliminer?