Dans d’autres villes, ils sont tous peints de la même couleur. Cela les rend jaunement plus faciles à reconnaitre. Aucun risque de monter à bord d’un taxi par accident.
Comme ce que je viens de faire.
Zut.
Dans d’autres villes, une grille ou une vitre protège les passagers. Aucun risque de se faire extraire les yeux par les mandibules électriques du chauffeur. Aucun risque de se faire happer par la langue gluante du coffre à gants.
Pas ici.
Zut.
Dans d’autres villes, une…
— Où allez-vous, Monsieur? me demande le chauffeur avec un accent extraplanétaire.
Je croise son regard dans le rétroviseur. Ce sont de faux yeux. C’est un faux visage. En dessous se cache sa peau métallique d’androïde mercurien. Son béret se prépare à se soulever pour révéler un amplificateur d’ondes radioactives.
Je lui dis le nom de mon quartier pour qu’il se mette en route. Même les robots les plus sophistiqués ne peuvent conduire et liquéfier leur proie en même temps. Une diversion pour survivre encore quelques minutes supplémentaires.
Ou seulement quelques secondes.
Le chauffeur louvoie sur la voie. Il cherche à m’accidenter et écrapoutir un piéton du même coup. Je m’accroche du mieux que je peux. Le véhicule mutantique se faufile, déformant l’espace routier pour s’insérer dans des endroits improbables. J’hésite entre garder ma ceinture de sécurité ou me détacher pour pouvoir fuir plus vite.
À la radio, j’entends les ordres venant du poste de commandement en orbite. La voix magnétique s’adresse aux robots-soldats par leurs noms numériques. Nous sommes sur le point de nous envoler. Le compteur fixé au tableau de bord indique le niveau d’énergie plasmatroscopique qui croît rapidement. Le moteur sera complètement chargé dans quelques instants.
Il n’y a qu’une façon d’interrompre ce compte à rebours inversé.
— Chauffeur, je vais descendre ici.