La soirée était bien avancée et j’avais prévu aller au lit tôt. Les combats que je dois mener contre eux presque chaque jour sont épuisants. Je dois dormir pour être en pleine possession de mes moyens.
Mon ordinateur émit une petite note. Quelqu’un désirait attirer mon attention par le service de messagerie instantanée. Je me demandais bien qui voudrait discuter à cette heure.
Il ne s’agissait pas d’une discussion, mais plutôt d’une invitation à aller prendre un verre. Ce soir. Maintenant. Ce n’était pas normal. Ces deux filles, je les connaissais à peine. Pourquoi voudraient-elles que je leur tienne compagnie?
Il était tard, mais mon cerveau était loin d’être endormi. Ce sont deux charmantes demoiselles. Très charmantes. Et certainement trop charmantes pour vouloir prendre un verre avec un simple écrivain survivant comme moi. Je ne suis pas moche, mais je ne suis pas de leur calibre. Vu la situation inhabituelle et l’implication de deux jolies jeunes femmes, il n’existait bien sûr qu’une seule explication. Ils tentaient encore de s’en prendre à mon point faible en m’envoyant leurs superbes agentes.
Cette fois, j’ai détecté la supercherie rapidement. Je ne me ferais donc pas duper!
— On se rejoint à 23h30 au bar. Ça te convient?
La bonne réponse à cette question était « non ». Il n’y avait aucune raison que je leur donne une occasion supplémentaire de me capturer. Elle ne m’aurait pas!
Par contre, en sachant à l’avance qu’il s’agissait d’un piège, je pouvais m’y rendre préparé, et ainsi avoir la chance d’en apprendre plus sur les tactiques de l’ennemi.
J’ai accepté. Je me sentais en forme pour une confrontation. Malgré l’heure tardive, j’étais même prêt à survivre à une lutte physique. À l’attaque.
Après avoir enfilé ma chemise la plus blindée, je me suis précipité à mon rendez-vous. Mon but était d’arriver bien avant ces agentes pour qu’elles n’aient pas le temps de mettre en place leur embuscade. Quelques minutes de reconnaissance des lieux m’aideraient aussi à mieux utiliser le terrain à mon avantage.
Mais elles sont fortes, et ma soirée ne serait pas aussi facile que je l’aurais cru.
D’abord, elles sont arrivées accompagnées. Au lieu de me mesurer à deux jolies agentes, je devais en plus faire face à un androïde, un robot sophistiqué dont la forme humaine tromperait le commun des mortels.
Ensuite, le bar où elles m’ont donné rendez-vous n’était pas celui où nous irions prendre un verre. J’avais étudié l’endroit pour rien. La destination était un autre bar qui m’était totalement inconnu.
J’aurais dû refuser l’invitation. Ce que je croyais être une preuve de courage s’avérait n’être que de la témérité, voire de la stupidité. Je me dirigeais tout droit dans la gueule du loup. Et impossible de fuir. Un androïde m’avait comme cible. Je ne pourrais jamais échapper à son death ray, ce rayon de la mort qui me désintègrerait en une fraction de seconde. J’étais totalement à la merci des deux agentes.
Quand je suis entré dans le bar, j’ai craint ne plus jamais en ressortir. J’entrais dans le pire de mes cauchemars, un délire onirique tellement réel qu’il semble fracturer la réalité. Cette fois, il n’y aurait pas de réveil-matin pour m’en libérer. J’aurais voulu prier pour qu’on vienne me libérer, mais, dans leur repère, aucun saint ne viendrait à mon secours. Adieu.
J’avais à peine fait deux pas à l’intérieur qu’une créature mi-humaine mi-terrienne me confisqua mon manteau. Une couche protectrice de moins. À travers de la forte musique, j’entendais des exclamations et des cris. Un frisson me grelota la nuque. Tous ces pauvres gens que j’entendais souffrir, qui appelaient à l’aide pour qu’on abrège leurs tortures. Je ne pouvais rien faire pour eux. Death ray, le robot, montait la garde. J’étais à un faux mouvement de devenir poussière.
— Qu’est-ce que tu bois? me demanda-t-il
Sa voix était une imitation parfaite de la voix humaine.
— Rien, répondis-je.
— Allez… Je te l’offre!
C’était prévisible qu’il me l’offre! Une boisson droguée! Cependant, le regard électronique ne me donna pas le choix d’accepter. Je préférais mourir plus tard.
Ce soir, ils tentaient vraiment le tout pour le tout. En plus de la drogue qui devait se trouver dans mon cocktail de boisson gazeuse et de jus de fruits, ils avaient mis des pailles! Elles avaient été placées sur le côté du verre exactement au bon endroit pour me crever un oeil quand j’allais prendre une gorgée! Je les ai enlevées assez vite! Pas question de mourir borgne!
Quelques minutes passèrent. Rien. Aucune attaque. La drogue empoisonnée ne faisait pas encore effet. Les deux agentes tentaient de me faire la conversation, mais je ne répondais pas. Je n’avais rien d’intéressant à leur dire. L’androïde, à cause d’un vice de programmation ou dans le but d’une diversion, me parlait sans cesse. Bizarrement, il ne niait aucunement ses origines robotique. Il ne cachait pas ses mouvements mécaniques saccadés et s’adressait à moi comme « les gens de votre peuple ». Cela m’inquiétait de voir tant de confiance de la part d’un des leurs.
Après quelques minutes de plus, durant lesquelles j’observais à défaut de fuir, une information importante m’est apparue. Chaque fois que j’ai rencontré une de leurs jolies agentes, elle était seule.
C’est parce qu’elles ne travaillent pas en équipe.
La plus petite des deux était en période d’entrainement. Je comprenais maintenant pourquoi elle était moins offensive. Et plus elles ont de pouvoirs, plus elles sont grandes. J’avais devant moi une agente très grande et, donc, très puissante, aux ressources insoupçonnées, avec des capacités d’ensorceleuse phénoménales. D’ailleurs, ses yeux perçants cherchaient ardemment à m’hypnotiser. Je résistais, mais à peine.
Death Ray déposa un autre verre devant moi. Une nouvelle dose de boisson droguée. J’ai une forme physique incroyable, ce qui fait en sorte qu’ils doivent insister pour m’empoisonner. Il était rendu très tard et je me tenais toujours debout. Elle décida alors de changer de stratégie et se leva. Elle et son apprentie m’invitèrent à danser.
Quelle idée ingénieuse de m’épuiser physiquement! Je dois avouer que j’avais une adversaire expérimentée. Ils m’avaient envoyé l’élite de leur armée. Je me sentais presque honoré de savoir que, quand j’allais succomber, ce serait entre ses mains.
Pas si vite! Je n’avais pas encore dit mon dernier mot. Une possibilité de fuite s’ouvrait à moi. J’avais bu deux verres, et il était donc logique d’avoir à soulager ma vessie. Excellent plan!
Les deux agentes ondulaient sur la piste de danse. Une chorégraphie de prédateurs dont les mouvements sensuels ne servent qu’à envouter leur proie. Fluidité, grâce, passion… douceur… volupté… regards… caresses… lèvres… courbes…
Urine! Je devais me concentrer sur mon plan! U-ri-ne. Je me suis donc excusé et dirigé vers les toilettes.
Un pas et demi plus tard, robotron-rayon-de-la-mort se dressait devant moi. Oups. Je n’avais pas vraiment envie, mais, à ce moment précis, j’ai failli mouiller mon pantalon. Plan échoué. Re-adieu.
Je me suis assis sur un tabouret, la tête baissée en signe de soumission. Elle cessa de danser et s’avança vers moi, l’apprentie immédiatement derrière. L’androïde restait debout près de moi. La fin arrivait.
— Je dois partir, annonça Death Ray.
Un portier tout en muscle se tenait derrière lui, les bras croisés, la mine sérieuse.
— Il y a eu un malentendu et je dois quitter le bar, expliqua-t-il.
Le portier venait à ma rescousse! Les portiers viennent toujours à ma rescousse! Il escorta le robot hors de ma vue, hors du bar, hors de danger. Juste à temps! Pas de désintégration pour moi ce soir! Ou plutôt cette nuit… Il était tellement tard que l’heure de la fermeture du bar arriva! J’allais pouvoir sortir sain et sauf!
Elle n’avait pas l’air très heureuse de cette situation. La petite non plus. Moi, je me retenais pour rire. Quand nous sommes sortis, j’ai inspiré une grande bouffée d’air de victoire.
— Death Ray, où es-tu? criaient-elles.
Et, pendant qu’elles partaient à la recherche du robot disparu, je m’enfuyais dans la nuit…
Je demeure toutefois un peu inquiet à savoir si ces boissons douteuses ne me causeront pas d’ulcères explosifs qui finiront par m’achever. C’est à suivre. Pour l’instant, il n’y a qu’une chose qui compte.
Elle ne m’a pas eu!
Je dévore vos aventures depuis quelques jours, et il me semble bien qu’ils ont, en effet, découvert votre point faible. Si vous ne changez pas de stratégie, vous courrez à votre perte. Vous ne pourrez toujours fuir devant l’ennemi. Vous devez être imprévisible. Parfois, l’attaque c’est la meilleure défense 😉
LOL.,,le robot death ray!tu l’as fait!ahahaha! C’est excellent Maxime! J’ai rie tout le long, c’est trèes exacte en quand même, hihihihi! L’apprentie EN!!!Ouais c’est cool!Sutout n’arrête jamais d’écrire:)
Ce qui est le plus drôle, là-dedans, c’est que j’avais bien l’impression que je savais qui étaient les deux agentes…
Toujours aussi bon, ce blog.
@V: Vous avez peut-être raison à propos de l’attaque. Je suis toutefois un pacifiste. Et j’aurais trop peur de blesser un innocent si j’engageais un combat…
@CoCo: Je ne vois pas ce qui vous fait rire. J’ai encore failli y passer.
@J.: Comme je viens de dire, je ne vois pas ce qu’il y a de drôle. Si vous connaissez ces deux agentes, c’est parce que vous en êtes une aussi. Je n’ai pas peur de vous!
Une chance que vous avez su vous en tirez! Quelle perte pour la bloguosphère si vous en veniez a disparaitre!
Un robot avec un Death Ray hahahaha
Pas pire 😉
Vous aimez donc vous exposer au danger, surtout lorsque les assaillants sont de jolies demoiselles… Vous finirez par vous faire avoir, protégez-vous!