Le Plan – Phase 4

Si MaX DeB est responsable de ma capture, il doit être éliminé.

Je ne suis pas violent, mais, dans ce cas-ci, c’est différent. Il a déjà réussi à me faire capturer, et il est possible qu’il réussisse à nouveau. La prochaine fois me sera fatale. Il voudra se venger. La torture ne sera pas une option.

— C’est toi ou c’est moi, lui dis-je en le regardant droit dans les yeux.

En fait, ce ne sont pas vraiment ses yeux. Il n’est même pas devant moi. Je suis debout dans ma salle de bain et je m’adresse directement à mon miroir.

Ce système de surveillance sophistiqué qu’ils ont installé chez moi retransmet instantanément mes paroles jusqu’à lui. Je sais qu’il me voit et m’entend. La caméra-miroir est aussi dotée d’un système psychosensible pour capter mes pensées et mes émotions. J’espère qu’il a peur. À sa place, moi j’aurais peur.

— C’est aujourd’hui que ça se termine.

C’est intimidant de parler à son image. Ça me donne la curieuse impression de me confronter moi-même.

Soudain, mon reflet cligne des yeux. Seulement mon reflet. Je penche la tête légèrement, hausse les épaules, entrouvre la bouche. L’image dans le miroir ne suit plus mes mouvements.

Dissociation.

Il a pris le contrôle des pixels réfléchissants du miroir. Son reflet transparait à travers le mien. Yeux bruns cernés, cheveux en bataille, joues creuses, épaules basses. Un regard teinté d’une lueur de folie. Les lèvres pincées formant un sourire en coin. Les boutons de chemise détachés, le col asymétrique. Misérable.

— Je suis trop fort pour toi.

En plus de me renvoyer mon/son reflet, le miroir retransmet sa voix grâce à un émetteur télépatronique, et ses paroles résonnent dans ma tête. Une communication bidirectionnelle est établie. Je crois même percevoir ce qu’il ressent. Mon état d’esprit se mélange au sien. Tourments, confiance, contrariété, quiétude. Le lien mental est verrouillé.

C’est exactement ce que je veux.

Je savais que je ne pourrais jamais le vaincre dans une confrontation physique. Je devais l’attaquer de l’intérieur. Détruire son esprit. Entrer dans sa tête et effacer son existence. Désintégrer ses pensées. Maintenant que nos ondes psychiques se confondent, je peux l’introtordre, l’endodéchirer, l’implofracturer, l’inverploser.

— Tu ne peux pas t’échapper.

— Toi non plus.

— Tu vas disparaitre.

— Tu perds ton temps, tu ne peux rien contre moi.

— Les lecteurs du blogue verront comme tu es faible.

— Arrête de m’imiter.

— C’est moi le plus robuste.

La discussion ne mène nulle part. Il refuse d’entendre raison. C’est comme si je parlais tout seul.

Par contre, pendant ce temps, je le sens faiblir. Je le vois faiblir. Son reflet s’estompe graduellement pour laisser place à ma propre image. Un visage propre et rasé. Les cheveux coiffés. Le torse gonflé d’assurance et le menton relevé de fierté. Des vêtements ajustés avec minutie. Des yeux verts perçants. Quelque part de l’autre côté du miroir, dans une autre dimension, sur une autre planète, dans un bureau souterrain secret ou en orbite sur un vélo galactique, il est en train de s’évaporer.

C’est le moment de me déconnecter. J’empoigne le vaporisateur parfumé qui se trouve sur le dessus de la cuve de toilette. Lavande matinale. Je m’asperge abondamment et je pulvérise mon reflet. Le lien est rompu.

Dans quelques secondes, tout sera dissipé. L’odeur et MaX DeB.

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