Parfois, ils sont moins offensifs. Ils élaborent des mises en scène pour me conditionner, dans l’espoir que je finisse par baisser ma garde. Ils croient, à tort, que je m’habituerai et que je cesserai de m’inquiéter…
C’est le soir. Le mince croissant de lune caresse de petits nuages frisés de ses rayons argentés. Il ne fait pas trop noir, mais la lumière de la lune ne suffirait pas à bien éclairer la rue où je me trouve. Des lampadaires repoussent la nuit en l’envoyant là où elle ne dérange personne. Entre les maisons, derrière des buissons, sous un balcon. Je suis libre de marcher sur le trottoir, à l’abri des mâchoires des ténèbres.
Mais ils m’observent. Ils savent exactement où je suis, où je vais. Puisqu’ils sont partout, le contrôle qu’ils exercent sur la ville est parfois même surprenant.
Le lampadaire directement au-dessus de moi s’est éteint. Ce n’est pas la première fois que ça se produit, ils me font souvent ce coup-là. Chaque fois, c’est la même chose.
Ce n’est pas l’obscurité totale, il reste d’autres lampadaires, la lune ou des voitures roulant sur la rue. Mais ce léger voile d’ombre suffit à me mettre à l’abri des regards. Ils peuvent surgir de n’importe où et m’agresser sans faire de témoins. Des tentacules monstrueux sortant d’une bouche d’égout m’agripperaient, des individus portant des cagoules m’attaqueraient à coups de seringues pleines de poison mutagène, un canon futuriste me bombarderait d’ondes radioactives pour liquéfier mes organes internes, ou pire.
Quand un lampadaire s’éteint, je cours. Ils peuvent éteindre des dizaines de lampadaires au-dessus de moi quand je me promène après le coucher du soleil, mais ils ne réussiront jamais à me faire croire que cela est normal. Un jour, il s’agira d’une vraie attaque et j’aurais pris l’habitude de courir.
Courez, vous aussi.