La porte de l’autobus s’ouvre et trois jeunes entrent. Le tintement de pièces de monnaie se fait entendre lorsqu’ils paient leur droit de passage. Ils viennent ensuite s’assoir au centre, sans cesser de piailler. Les jurons en « F » abondent.
Quand je voyage en autobus, je préfère m’assoir sur le banc du fond. De là, je peux mieux observer tout ce qui se passe à bord. En ce moment, je suis bien content d’être assis là. J’ai pu détecter rapidement ce qu’il y avait de louche chez ces trois nouveaux passagers.
Ce sont de faux jeunes.
Le premier camoufle ses tentacules derrière ses bras trop longs. Le deuxième dissimule sa tête pointue sous une coupe de cheveux en faux mohawk. Le maquillage du dernier ne tient presque plus et son visage picoté de rouge semble se désagréger. Les trois sont aussi en communication continue avec leur base centrale, comme l’indiquent les écouteurs à leurs oreilles.
Quand je voyage en autobus, je préfère éviter de m’assoir sur le banc du fond. Complètement au bout, je suis loin d’une issue et je risque d’être prisonnier d’un cul-de-sac roulant. En ce moment, je suis bien nerveux d’être assis là. Si ces faux jeunes décident de m’attaquer, je suis coincé.
L’un d’eux, celui avec les cheveux en crête aérodynamique, sort une petite bonbonne noire de son sac. Il la secoue vigoureusement et vaporise ensuite le contenu sur tout son corps. Sur le contenant, je remarque l’inscription suivante : 3XV. Il s’agit de son code de système solaire et le contenu est en fait l’air chimique de sa planète natale qu’il doit respirer. Il vaporise encore, et encore…
Les vapeurs se rendent jusqu’à moi. L’odeur forte est presque insoutenable. C’est pire que si j’avais été assis à côté d’un petit monsieur édenté malpropre et flatulent. Au moins, même si l’air avait été malodorant, j’aurais continué à respirer de l’air terrien. En ce moment, l’oxygène à bord de l’autobus se fait graduellement remplacer par une atmosphère extra-terrestre.
J’étouffe. Mes yeux brulent. Le vaporisateur continue à siffler.
Je chuinte un râle. Je hoquète d’agonie. Je tousse du vide. Mais, malgré mes poumons en torture, j’arrive à étendre le bras et atteindre la poignée de la fenêtre coulissante. D’un mouvement désespéré, je pousse un bon coup, m’effondrant presque sur le plancher par la même occasion.
Grande bouffée d’air urbain.
J’inspire un bon coup, et ouvre une deuxième fenêtre. Et une troisième. L’oxygène à bord se renouvelle. L’air chimique se fait chasser. Les trois pseudojeunes se mettent à rire, mais je sais que c’est leur façon étrangère de s’étouffer. Le vaporisateur ne suffit plus. Ils sont sur le point de suffoquer à leur tour. Leurs éclats de toux résonnent jusqu’au prochain arrêt, où ils s’empressent de descendre.
Du trottoir, ils me saluent, une forme d’insulte dont la signification m’échappe. Je détourne le regard et me plante le visage dans l’ouverture d’une fenêtre. Je respire lentement. Une vieille voiture croise l’autobus, son pot d’échappement crachant une fumée bleue. Ah! Que ça fait du bien!
Ah ah ah! J’aime!
Le coup de la bouteille de AXE à l’envers, c’est du grand DeBleu!
Heureux que tu aies encore pu leur échapper.
Hier, ils sont venus à ma rencontre. Ils devaient être une vingtaine. Mais je les ai déculottés. Désormais, ils seront 20 culs!
@Chocolyane: Moi aussi j’aime. J’aime l’oxygène. J’aime l’air terrien.
@Celui qui blogue: Tu fais erreur. Je n’ai pas donné de coup de bouteille à personne. Je suis un pacifiste.