Je ne sors jamais de chez moi à la même heure. En étant imprévisible, je suis plus difficile à embusquer. Et si je suis chanceux, je peux même les surprendre… Comme ce matin, alors que je les ai vus en train de me préparer un piège.
Il y avait toute cette machinerie monstrueuse au coin de ma rue, à l’intérieur d’un territoire balisé avec des cônes orangés. Un ogre mécanique creusait l’asphalte avec son puissant bras. Les morceaux de pierre pulvérisée étaient chargés dans le ventre d’un engin à roues gourmand, qui clignotait de son oeil lumineux. Derrière, une machine à déféquer du béton attendait patiemment son tour pour se joindre aux activités.
Plusieurs de leurs employés travaillaient aussi parmi ces géants métalliques. L’un d’eux s’attaquait au trottoir avec une scie juteuse, laissant derrière lui des fentes humides. Un autre perçait des trous dans un tuyau, comme un pic-bois dément. Deux personnes manipulaient une boite d’où s’écoulait un emmêlage de cheveux électriques. Quelques autres étaient postés autour et observaient le bon déroulement des opérations, les bras croisés. Tout ce chantier de construction pour une installation bien simple.
Ils étaient en train de piéger un banc de parc.
C’était facile de deviner ce qui se passerait une fois leur travail accompli. Lorsque je m’y assoirais, le dossier se refermerait autour de moi pour m’emprisonner. Ensuite, des tubes jailliraient de chaque côté et se planteraient dans les veines de mes poignets. Non seulement je n’aurais plus de sang dans les bras, mais mon corps entier se ferait interminablement siphonner, comme une perfusion sanguine inversée. Mes fluides aspirés rejoindraient leur réseau de canalisations souterrain. Et, une fois vidé, le banc lui-même m’avalerait.
Ils étaient tellement absorbés par leur travail qu’ils n’avaient pas remarqué que j’étais témoin de l’élaboration de leur plan. Je me suis donc approché un peu, pour mieux observer leur façon de travailler. Un petit pas à la fois. Lentement. Tout en douceur.
Évidemment, ils ne sont pas si bêtes. Ils avaient posté une unité de surveillance avancée. Une petite créature canine se mit à japper son alarme. J’aurais voulu aller plus loin, mais j’étais repéré.
Au moins, ils ne m’attaquèrent pas. L’installation de leur banc au dossier piégé avait échoué, et cette constatation suffit à les décourager. Ils levèrent à peine les yeux vers moi et firent semblant de continuer à travailler. Des soldats impuissants. Tout ce travail pour rien.
Je me demande combien d’autres bancs sont ainsi piégés…
Je pense que peu de bancs sont piégés, heureusement. Leurs méthodes de travail n’étant pas très efficaces, c’est un avantage pour nous.
J’aurais tendance à croire Tridimensionnel. Mais je suis certaine que pour vous avoir, ils seraient prêt à tout faire, le prix n’ayant pas d’importance.
Salut MaX DeB. Je viens de te parodier ici : http://ilblogue.com/il-blogue-dans-le-style-de-maxime-debleu/
Mais c’est surtout pour t’aider à leur échapper…
Eh bien ! Quelle originalité… une plume schizo, et surtout à mourir de rire !